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[En Essonne Réussir] JO 2024: L'esprit olympique souffle sur l'Essonne #4

Publié le 26 Avril 2024

La tenue des Jeux olympiques et paralympiques promet, certes, quelques difficultés de circulation mais c’est aussi une chance de développer son activité, dont certaines entreprises essonniennes profitent, ou encore l’occasion de penser à faire équipe avec un sportif de haut niveau.
Dossier réalisé par Laurence Amette et E. Vilmos

 

PARTIE 4: LES ENTREPRENEURS SE PRENNENT AUX JEUX

Et si vous deveniez champion olympique… par procuration ? À défaut de transpirer sur le terrain, tout chef d’entreprise peut participer et s’offrir ce rêve tant les initiatives pour soutenir les sportifs français se multiplient.

Team Réussite, la dernière en date, est le résultat de la rencontre de Dominique Restino avec Stéphane Traineau. Le premier a importé du Québec le mentorat entrepreneurial et le second possède l’un des plus beaux palmarès du judo français. Depuis janvier 2023, ils font équipe pour que des athlètes sélectionnables pour les Jeux olympiques et paralympiques de Paris 2024 soient accompagnés par des entrepreneurs bénévoles avec un volet financier. « Grâce à leurs nombreuses similitudes (esprit combatif et d’exigence, capacité à relever des défis et à rebondir), ils se comprennent en partageant leurs expériences. Le mentor aide à se poser les bonnes questions, à bénéficier de l’effet miroir, à ouvrir le champ des possibles, à prendre du recul et à appréhender une future carrière professionnelle », explique Dominique Restino, président de l’Institut du mentorat entrepreneurial et de la CCI Paris Île-de-France. Et ce programme, qui concerne actuellement 30 binômes et qui va finalement s’inscrire dans le temps, est d’autant plus innovant que cette relation mentorale est couplée à un soutien annuel de 5 000 euros (+ 1 000 euros de frais de fonctionnement), déductible à 60 % puisque la convention est signée avec le Club Insep Alumni, l’association des sportifs de l’Institut national du sport présidée par Stéphane Traineau.

Un autre dispositif pour inciter le dirigeant à financer des sportifs inscrits sur la liste ministérielle de haut niveau (SHN) a vu le jour en 2015, après un rapport du Sénat qui révélait que plus de la moitié d’entre eux vivaient en dessous du seuil de pauvreté. Loin, très loin de l’image de la star millionnaire. Le Pacte de performance permet aussi de recourir au mécénat en passant par la Fondation du Sport Français, reconnue d’utilité publique. Les entreprises soutiennent les champions jusqu’à 23 000 euros pour une année, dont 20 700 sont reversés à l’athlète sous forme de bourse, avec à la clé une réduction d’impôts du don versé à hauteur de 60 %.

TOUS AU SERVICE DE LA PERFORMANCE

La société est libre d’utiliser ce partenariat pour développer sa marque employeur ou sa notoriété, créer une dynamique RSE, partager ses valeurs ou attirer de nouveaux talents. « Nous voulions promouvoir la féminisation de nos métiers », explique Sophie Gozlan, directrice projet capital humain de Fayat Énergie Services (Viry-Chatillon). Cet établissement, spécialiste du marché de la construction, accompagne depuis un an les judokates Priscilla Gneto et Fanny-Estelle Posvite : « Nous relayons en interne tout le contenu (résultats, voyages) qu’elles partagent avec nous pour créer du lien et nous leur montrons le monde de l’entreprise. Nous avons même organisé un "Vis ma vie" : nos collaborateurs ont passé une matinée avec elles lors d’un entraînement pour évoquer les stéréotypes, les sacrifices pour réussir, le dépassement de soi et la résilience, puis elles sont venues sur l’un de nos chantiers à l’aéroport de Beauvais.»

Le SHN, lui, peut se servir de ce montant (l’équivalent de la prime allouée par l’État à chaque médaillé de bronze cet été) comme bon lui semble. « La Caisse d’Épargne Île-de-France contribue par exemple à payer des stages d’entraînement, à prendre en charge mon kiné en déplacement ou encore à m’offrir un surclassement sur les vols long-courriers », témoigne Pascal Martinot-Lagarde, le sprinter de l’ES Montgeron Athlétisme. Celui qui rêve de disputer ses troisièmes JO consécutifs* est l’un des onze essonniens qui bénéficient cette année d’un Pacte de performance.

Ce dispositif permet aussi d’opter pour le mécénat de compétences, via une Convention d’insertion professionnelle : l’entreprise embauche un athlète (CDI ou CDD) à temps complet, même s’il n’est présent qu’à mi-temps, et les périodes non travaillées, soit le temps libéré pour se consacrer à sa pratique, sont défiscalisables. Attention cependant, l’emploi de ce salarié nécessairement différent est souvent… sportif ! Il faut aménager son temps de travail selon son calendrier de compétiteur, adapter ses missions et lui proposer un poste qui soit plutôt en autonomie (son absence ne doit pas être préjudiciable au reste de l’équipe), mais pas trop pour faciliter son intégration. À noter que l’Agence nationale du sport verse parfois une compensation pécuniaire complémentaire à l’employeur qui encourage son insertion professionnelle.

DES CHAMPIONS DANS L’ENTREPRISE

Stéphane Nomis, fondateur du cabinet de conseil en technologie Ippon Technologies a été l’un des premiers à se mobiliser pour sécuriser le parcours des SHN. Une évidence pour l’ancien président du club de judo FLAM 91 qui a grandi à Grigny : «J’ai toujours voulu rendre au sport ce qu’il m’a apporté. Quand j’étais judoka, avec tous mes collègues en équipe de France, nous avons vécu de vraies difficultés financières. J’ai donc souhaité m’engager en tant que chef d’entreprise auprès d’eux ».  Avant de prendre les rênes de la Fédération de judo en 2020, il a  embauché ou accompagné des champions olympiques et mondiaux Émilie Andéol, Kilian Le Blouch, Alexandre Iddir, Marie-Ève Gahié, Éloyse Lesueur sont quelques-uns des noms qui brillent parmi les champions olympiques et mondiaux.

« Le Medef Essonne est rarement sollicité pour favoriser ces rapprochements , déplore Jean-Pierre Mougin, le président de son comité sport. Toutefois, nous avons mis en contact un membre de l’équipe de France de voltige aérienne qui cherchait de l’aide avec Safran Aircraft Engines, devenu son employeur désormais. Et avec l’organisation des Jeux en France, le Medef a lancé, en 2021, la plateforme jesoutiensunathlete.fr destinée à mettre en relation des sportifs avec des patrons. » Ainsi, trois escaladeurs de l’ES Massy ont réalisé une vidéo pour exprimer leurs besoins.

L’ENTREPRENEUR COMME EQUIPIER

Enfin, d’autres misent sur le sport et ses acteurs depuis des décennies. Pascal Bovis, à la tête du groupe de transport familial depuis 1989, apporte environ 65 % du budget du club de foot du FC Fleury 91 qu’il dirige depuis… plus de 35 ans ! Surnommé « le président-mécène » du seul club amateur possédant une section féminine dans l’élite, il n’hésite pas à offrir aux joueurs/joueuses qu’il veut recruter, ou à leurs proches, un travail dans sa société. Son investissement, dans tous les sens du terme, lui a d’ailleurs valu d’être choisi par le Département pour porter la flamme olympique le 22 juillet. « C’est un vrai passionné qui s’implique énormément pour le foot féminin », confirme Léa Le Garrec, la capitaine de Fleury, professionnelle depuis 2016. En 2008, quand j’ai intégré le seul centre de formation pour les filles à 15 ans, on ne parlait pas beaucoup de cette discipline. Même sélectionnée en équipe de France jeunes, je n’étais pas certaine de pouvoir vivre du métier de footballeuse, alors j’ai toujours fait passer mes études avant, refusant même à 18 ans le contrat professionnel proposé par le PSG », se souvient-elle. À 31 ans, elle espère bien être dans la liste des 18 joueuses retenues pour les JO*, après avoir disputé la Coupe du monde en 2023.

« En s’engageant aux côtés des athlètes, les entreprises leur apportent la confiance nécessaire à l’accomplissement de leur sport à très haut niveau, stabilisent leur situation sociale, et leur ouvrent des perspectives pour leur vie d’après-carrière », résume Stéphane Nomis. Qu’il soit mentor, mécène ou employeur, l’entrepreneur est devenu un équipier qui fait gagner nos sportifs.

 

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TEMOIGNAGES:

Marc Alexandre Champion olympique de judo en 1988

« J’ai commencé le judo à 5 ans à Vigneux-sur-Seine, et 19 ans après j’ai remporté une médaille de bronze olympique qui m’a fait changer de statut, et qui m’a valu une grande fête de retour à Vigneux, d’où venait également l’athlète Joseph Mahmoud, médaillé d’argent. Mon titre olympique de 1988, alors que j’étais devenu orléanais, restera à vie, mais ma carrière ne se résume pas à ça. J’ai reçu du judo et j’ai eu envie de redonner. Diplôme de prof de sport en poche, j’ai été fonctionnaire détaché auprès de la Fédération comme athlète, puis entraîneur et enfin formateur des cadres, avant de prendre ma retraite en novembre. Je suis très attaché à mes origines et je reviens régulièrement en Essonne, terre de judo : le premier champion du monde français Jean-Luc Rougé a été formé à Gif-sur-Yvette, le médaillé mondial Darcel Yandzi à Épinay-sous-Sénart et aujourd’hui le club FLAM 91, très investi sur le territoire au niveau sociétal, obtient de très bons résultats. »

Chloé Pelle Vice-championne olympique de rugby à 7 en 2021

« Je me suis mise au rugby tard, à 20 ans, lors de mes études d’ingénieur en 2009. Deux ans après, j’intégrais l’équipe de France de rugby à XV, et la suivante celle de rugby à 7, cumulant les deux entre 2018 et 2021. J’ai été très déçue de ne pas être sélectionnée pour les JO en 2016, où le rugby faisait son retour. La joie n’en fut que plus grande avec la médaille d’argent gagnée aux JO de 2021. Et ça donne encore plus envie d’aller chercher l’or cet été. D’autant plus que ce sera à domicile, au Stade de France devant 60 000 personnes ! Arrivée au RC Chilly-Mazarin en 2020, je ne joue pas beaucoup avec mon club en ce moment (aucun match ces deux dernières années). Depuis 2014, je bénéficie d’un contrat fédéral (je suis payée par la fédération) et depuis 2018, je travaille également comme ingénieure cybersécurité à la Société Générale. Tous les ans, nous signons un avenant qui détermine mon temps d’activité. Cette saison, je suis à 10 %, soit 21 jours de travail. C’est essentiel de garder un pied dans le monde du travail pour ma reconversion qui est imminente. »

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LES SPORTIFS ESSONNIENS AUX JO

Est qualifiée :

  • Shirine Boukli (judo, FLAM 91).

Sont très fortement pressentis (membres indiscutables d’une équipe de France qualifiée) :

  • Chloé Pelle et Lina Guérin (rugby à 7, RC Chilly-Mazarin),
  • Manelle Inaho (gym rythmique, SCA 2 000 Évry),
  • Andy Timo et William Iraguha (rugby à 7, ils ont été formés au Rugby Club Massy Essonne).

Sont probables :

  • Léa Le Garrec (football, Fleury),
  • Vincent Luis (triathlon, Sainte-Geneviève-des-Bois),
  • Oriane Jaillardon (natation artistique, GPS Corbeil-Essonnes aquatique).

* La liste des athlètes qualifiés pour les JO sera officielle le 8 juillet.

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PARTIE 1 : JO 2024: L'esprit olympique souffle sur l'Essonne 

PARTIE 2 : QUELLES RETOMBÉES ÉCONOMIQUES ?

PARTIE 3 : LES JO EN ESSONNE