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[En Essonne Réussir] Face à l'inflation et à la hausse des taux #1

Publié le 29 Mars 2024

Depuis deux ans les entreprises doivent à la fois faire face à une très forte remontée de l’inflation et au renchérissement du coût crédit. Elles s’organisent pour palier la hausse de leurs coûts et financer activité et investissements, tout en guettant les signes d’amélioration.

 

Et voilà l’hydre inflationniste de retour ! On la pensait, pourtant, assoupie au fond d’un quelconque loch écossais. Pensez, tant d’années sans véritable flambée des prix ! Le réveil est brutal. « Deux effets se sont cumulés sur le prix des matières premières. D’un côté une pénurie qui a fait flamber les prix, de l’autre un renchérissement des coûts de fabrication car il faut de l’énergie pour produire », constate Xavier Brengues, le patron de Senior Aerospace Calorstat, une entreprise sous-traitante de l’aéronautique implantée à Dourdan.


DE LA HAUSSE DES COÛTS À LA HAUSSE DES TAUX


Comme l’hydre de la légende, l’inflation est très difficile à combattre car, en quelque sorte, elle a aussi plusieurs têtes. « Le sujet ne touche pas que les matières premières. Si je prends les grandes masses d’un compte de résultats d’une société comme la nôtre je constate que nous avons eu clairement une explosion générale des coûts en 2022 », témoigne Thibault Durieu, président du groupe Durieu, spécialisé dans la production de produits de traitement du bois et des métaux.
Au début de l’automne, l’augmentation des prix à la consommation atteignait 5 % sur un an. Sans doute était-il raisonnable d’espérer qu’elle ne dépasse pas ce niveau à la fin de l’année. Ces derniers mois ont, de fait, vu un léger ralentissement de la hausse des prix des services, des biens alimentaires et des produits manufacturés. Une lueur d’espoir, un peu ténue quand même. « On note un ralentissement de la hausse mais pas une baisse », relève Thibault Durieu. Pour juguler l’inflation, les banques centrales n’ont cessé de faire grimper leurs taux directeurs. Cela a provoqué un renchérissement du coût du crédit bancaire et mis les entreprises en demeure de rechercher diverses solutions pour financer leurs activités et leurs investissements (voir p. 30). Ainsi en juin 2023, et selon la Banque de France, le taux moyen des crédits bancaires s’élevait à 4,33 % contre 4,13 % en mai et 3,95 % en avril.


QUAND LES ENTREPRISES S’ADAPTENT


Le réflexe des entreprises aura été d’augmenter leurs propres tarifs et de s’organiser en conséquence. « On cherche à anticiper les variations des coûts pour pouvoir définir une politique de prix en amont », relève Erdogan Yildiz, président du cabinet d’expertise-comptable Sofie (Ris-Orangis). Certaines hausses ont pu être répercutées. Pas systématiquement. « Les clients ne veulent pas s’aligner automatiquement. Parfois il y aussi des contrats signés de longue date et que l’on a du mal à renégocier », poursuit-il. Les comptes de charges sont passés au crible et notamment les consommations d’énergie, comme chez le fabricant de produits adhésifs Labord (Saint-Germain- Lès-Arpajon) qui a fait un audit énergétique avec l’aide de la CCI Essonne. « Ce bilan nous a permis d’analyser les points de dépenses énergétiques et d’avoir une vue d’ensemble sur différents aspects : dépenses à engager, aides potentielles et retour sur investissement », rapporte Sonia Ginet, responsable des Affaires règlementaires produits et QHSE.
Selon une étude de la Fédération bancaire française (FBF), les banques n’ont pas failli à leur rôle de soutien de l’économie. Ainsi, en juin 2023, la croissance de l’encours total des crédits aux entreprises dédiés à l’investissement était encore de 6,5 % sur un an.
Certaines entreprises, pour éviter de s’endetter, ont eu recours à la vente avec location, cédant leurs équipements ou leurs locaux à un tiers à qui elles les louent par la suite. Assez peu, en revanche, auraient ouvert leur capital à un investisseur. « On cherche un actionnaire minoritaire quand on ne peut plus rien obtenir des banques. Le prix à payer, c’est la réduction de sa part dans le résultat », avance Étienne Lebert, P.-D.G. du cabinet Hemera Consulting et ancien conseiller stratégie & finances à la CCI Essonne.


UNE PRESSION ENGAGÉE SUR LES SALAIRES


Avec le retour de l’envolée des prix, c’est aussi la boucle inflation/hausse des salaires qui s’est enclenchée. Certes, le niveau des rémunérations s’est progressivement élevé, presque en proportion de celui de l’inflation. Il serait, globalement, en hausse de 4,5 % en 2023 ; ce qui est exceptionnel car, selon l’Insee, les salaires n’avaient évolué que de 0,6 % en moyenne par an entre 1996 et 2018. Mais l’inflation n’a pas dit son dernier mot et, en outre, la pénurie persistante de main d’oeuvre pousse aux surenchères, si bien que beaucoup de chefs d’entreprises s’attendent encore à une pression sur les salaires. Dans cette période, l’évolution des rémunérations s’est plus souvent que d’habitude traduite par des hausses de salaires. Mais ce n’est pas toujours possible pour les TPE-PME. « On travaille le salaire mais comme nous avons des marges limitées on travaille tous les à-côtés pour offrir un package attractif où figurent, par exemple, la qualité de vie au travail, la participation et encore l’intéressement », rapporte Xavier Brengues.
Selon une étude du cabinet PageGroup, 63 % des postulants à un poste plébiscitent les avantages financiers, 50 % une mutuelle avantageuse et 31 % un plan d’épargne retraite entreprise. Les parades à l’inflation nécessitent aussi des réponses stratégiques. « In fine, des entreprises comme la mienne doivent se battre plus sur la valeur que sur les volumes », avance Thibault Durieu. « Il faut aussi avoir des projets. Il faut être offensif en matière de vente. Trop souvent on vend de manière routinière. Là, c’est le moment de se demander : puis-je innover, exporter, élargir ma clientèle ? », insiste, pour sa part, Étienne Lebert.

Auteur: E.Vilmos

 

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CHASSE AU GASPILLAGE
Dans nombre d’industries productives, le sujet majeur est plus que jamais la facture d’électricité. « On essaye de réduire notre consommation autant que faire se peut mais ce n’est que de quelques pour cent alors que l’augmentation des prix est plus importante », assure Xavier Brengues de Senior Aerospace Calorstat. L’entreprise suit de près ses indicateurs d’efficacité énergétique et investit au fil de l’eau pour réduire sa dépendance à l’électricité mais n’a pas de solutions magiques. « On poursuit nos efforts mais on n’a pas de carte joker pour accélérer. Ce qu’il nous faudrait ce sont de nouvelles technologies, ce qui implique encore plus d’investissements et de longs délais », reconnaît Xavier Brengues. Le groupe Durieu a pris pour sa part une mesure radicale dès l’automne 2021 : l’arrêt partiel de la production dans ses deux usines dont celle de Bondoufle.
« L’été nous produisons cinq jours par semaine et l’hiver quatre jours. Précédemment ces quatre journées s’étalaient, par un système de rotation, entre le lundi et le vendredi. Maintenant il n’y a plus de rotation le vendredi. Cela permet de nous affranchir de consommation électrique quatre jours par mois », explique Thibault Durieu.

 

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AUGMENTATION DES PROCÉDURES COLLECTIVES
Déjà essorées par la crise Covid, certaines entreprises subissent plus fortement l’inflation et ne peuvent plus faire face. Ainsi, sur les six premiers mois de l’année 2023, le Tribunal de commerce d’Évry-Courcouronnes a enregistré 36 % d’augmentation du nombre de procédures collectives qui lui ont été soumises. « Malheureusement trois quarts des dossiers de procédures se terminent par un jugement de liquidation car la situation des entreprises concernées est trop dégradée », déplore Sonia Arrouas, présidente du Tribunal de commerce (elle quittera ses fonctions le 11 janvier 2024, ndlr). Aussi cette dernière insiste énormément sur la conciliation. « Dès les premières difficultés, les dirigeants devraient nous solliciter. On peut alors trouver des mesures amiables. On sauve beaucoup plus d’entreprises quand elles font cette démarche préventive que quand elles passent par le tribunal », poursuit Sonia Arrouas.
En cette période maussade où le coût du crédit contribue aussi à refroidir les ardeurs des porteurs de projet, le Tribunal de commerce d’Évry-Courcouronnes a également enregistré une diminution du nombre de créations d’entreprises.

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Investissement d’actifs immobiliers
SEM parapublique « Île-de-France Investissements et Territoires » concentre ses activités sur des actifs immobiliers contribuant au
développement économique de la région. Ainsi est-elle intervenue dans une opération de « vente avec location » avec option de rachat, portant sur les locaux d’une société industrielle spécialisée dans le matériel d’incendie et de désenfumage à Osny (Val-d’Oise). La filiale tourisme de la SEM est également partie prenante d’un projet de reconversion d’un domaine forestier en Seine-et- Marne où sera créé un complexe touristique inédit dans le département.
Plus d’informations :
contact@idf-invest-territoires.fr